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Il s’agit d’un véritable casse-tête de société : les besoins sociaux s’accroissent sans que les gouvernements ou les mécanismes de marché ne soient en mesure d’y répondre adéquatement. Dans ce jeu de société, l’entreprenariat social apporte sa contribution.
par Rachid LAOUAMER, avec la collaboration d’Anne-Marie PICHETTE et de François LABELLE
Les pièces manquantes du casse-tête
Participants essentiels, les entrepreneurs sociaux utilisent leurs capacités entrepreneuriales pour répondre à un besoin social mal satisfait. Animés d’une grande volonté de régler des problèmes, ces hommes et ces femmes développent de nouveaux services aux individus et à la collectivité, favorisent l’emploi, luttent contre l’exclusion et la pauvreté, renforcent la cohésion sociale ou encore dynamisent des territoires en difficulté.
En plus de comprendre les problématiques sociales pour lesquelles ils trouvent des solutions, les entrepreneurs sociaux possèdent aussi les compétences des entrepreneurs classiques. Toutefois, la rentabilité et les profits financiers ne représentent pas une fin en soi pour les participants de l’économie sociale, mais constituent plutôt une étape au service d’un projet social à valeur ajoutée.
Les pré-requis : engagement et créativité
L’engagement social et la créativité sont au cœur du projet entrepreneurial des leaders de l’économie sociale, quelle que soit l’ampleur du vide à combler. Les cas de Genya Johnson et Margaret Handforth, respectivement fondatrices du Get Sorted Academy of Music et le Castleford Community Learning Centre en Grande-Bretagne, constituent des exemples types. La première offre des cours de formation aux jeunes en difficulté de sa communauté. Elle utilise la musique pour les attirer et pour se financer. La deuxième finance une partie de la formation offerte aux adultes de sa communauté en louant ses locaux à des universités. Malgré que ces deux bâtisseuses aient des histoires différentes, elles ont deux points en commun : un sentiment de responsabilité envers leurs communautés respectives et une forte inventivité dans leurs approches de financement.
Une participation bien balisée
Pour réussir, les entrepreneurs sociaux suivent une démarche en quatre points. Cette observation découle d’une étude menée en Grande-Bretagne par John L. Thompson, professeur à l’université de Huddersfield.
1. Il manque une pièce !
Il s’agit d’abord d’identifier un besoin social pour lequel il ? n’existe pas de solution satisfaisante. C’est là la première contribution des entrepreneurs sociaux : ils comprennent qu’il manque une pièce. Le repérage du besoin passe par une bonne connaissance de la société et de ses enjeux. Les entrepreneurs sociaux s’appuient sur des expériences personnelles et professionnelles.
2. Concevoir la pièce manquante
Ensuite, les entrepreneurs sociaux imaginent une réponse pertinente au besoin identifié. Cette réponse ne passe pas forcément par la création d’une nouvelle solution. Il peut en effet s’agir de l’utilisation repensée de pièces existantes. Surtout, la bonne idée n’est pas tout ; il faut définir les stratégies et les modes opératoires, trouver les ressources nécessaires, puis démarrer le projet.
3. Jouer le jeu
Qu’il s’agisse d’une pièce toute neuve ou d’une combinaison nouvelle de pièces existantes, il faut lui donner forme. Pour cela, il faut rallier d’autres personnes au projet, les convaincre de son bien-fondé, trouver des locaux si nécessaire et collecter des fonds. Cette étape nécessite de la créativité et de la détermination.
4. Placer la pièce finale dans le casse-tête
Non seulement la solution envisagée doit répondre à un besoin mais elle doit aussi s’insérer dans le tissu social. Les ressources acquises sont utilisées pour consolider la solution, assurer sa promotion ainsi que sa gestion. La mise en place de la solution correspond à son acceptation par la société. À cette étape, les qualités d’un bon entrepreneur d’affaires sont requises.
Un jeu collectif
Les diverses étapes d’un projet d’entrepreneuriat social peuvent être réalisées par plusieurs personnes différentes aux compétences et aux ressources complémentaires. Par exemple, la Maison Gilles-Carle, un centre de soins et de répit aux proches aidants situé à Cowansville au Québec, a été initié par l’actrice et chanteuse québécoise Chloé Sainte-Marie à la suite d’une expérience toute personnelle liée à la maladie de son conjoint. Sainte-Marie a déployé son énergie pour la recherche de financement alors que le développement du projet a été rendu possible par le Regroupement Soutien aux Aidants de Brome-Missisquoi qui possède l’expertise et les ressources techniques nécessaires à la gestion d’un tel établissement.
Pour un meilleur contrôle du jeu de société
Les bailleurs de fonds demeurent exigeants envers les initiatives sociales et communautaires et s’assurent que les ressources fournies soient gérées d’une façon efficiente. Dans, ce contexte où "la cause n’est pas tout", les entrepreneurs sociaux doivent posséder ou acquérir diverses compétences, notamment en contrôle de gestion. Le mentorat par des personnes d’expérience peut apporter un appui en ce domaine.
Ces joueurs sociaux ont aussi besoin de ressources humaines et financières de plus en plus difficiles à obtenir. Pourtant essentiel pour faire rouler les rouages de la société, l’entrepreneuriat social n’est pas considéré au même titre que l’entreprenariat classique, ce qui rend l’accès à ces ressources encore plus difficile. Pour y arriver, une meilleure visibilité des entreprises sociales est nécessaire. La promotion de leurs activités constitue une activité incontournable. L’accès à des réseaux et le soutien de personnes clés peut aussi s’avérer utile.
Le "casse-tête de société" est un jeu dynamique. Certaines pièces changent de forme au fur et à mesure de l’évolution de la société. Le nombre de pièces et l’image finale sont inconnus. Passionnés et créatifs, les entrepreneurs sociaux y voient là l’occasion de contribuer à créer un monde meilleur.
Pratiques clés | @vigiepme #ddpme |
Ancré dans son milieu, l’entrepreneur social fait preuve des mêmes compétences que l’entrepreneur classique. |
Pour en savoir plus
John L. Thompson, (2002). The world of the social entrepreneur, International Journal of Public Sector, Vol. 15, Issue: 5, pp. 412-431.
- John L. Thompson, University of Huddersfield : www.hud.ac.uk/ourstaff/profile/index.php?staffuid=sbusjlt
- La Maison Gilles-Carle : www.rsabm.ca
- Get sorted Academy of Music : www.getsortedmusic.co.uk
- Castleford Community Learning Center : www.cclc.co.uk
Pour d’autres pratiques ancrées dans l’action, consultez le site de Synapse, notre partenaire de l’Université du Québec à Chicoutimi
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Le site d’échange, de participation et de collaboration sur des thèmes de développement durable : http://synapse.uqac.ca |
À propos des auteurs
Rachid LAOUAMER est étudiant au programme de MBA de l’Université du Québec à Trois-Rivières.
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Une initiative du Laboratoire de recherche sur le développement durable en contexte de PME – Institut de recherche sur les PME de l’UQTR
Direction : François Labelle ( Cette adresse e-mail est protégée contre les robots des spammeurs, vous devez activer Javascript pour la voir. ) – Rédaction en chef et coaching : Anne-Marie Pichette ( Cette adresse e-mail est protégée contre les robots des spammeurs, vous devez activer Javascript pour la voir. )